Le système de sucession et de répartion de l’héritage appliqué actuellement au Maroc est devenu socialement dépassé, compte tenu du rôle central de la femme au sein de la famille contemporaine (16,9% des familles, soit 1.5 millions de familles sont dirigées par des femmes en 2022 selon le Haut Commissariat au Plan. De plus, l’évolution des valeurs sociales, dont la notion de justice a contraint de nombreuses familles à répartir leur argent/biens entre leurs fils et filles selon ce qu’elles considèrent comme juste, c’est-à-dire conforme au principe de l’égalité.
Les familles qui n’ont pas eu d’autres enfants que de sexe féminin recourent également à la formule de la vente, afin de ne pas laisser aux mâles du clan l’occasion de prendre possession d’une partie du patrimoine puisqu’ils n’ont pas contribué à son accumulation, ou que la relation familiale s’est détériorée.
Par ailleurs, le ‘taassib’ n’a pas été mentionné dans le Coran, mais instauré par la jurisprudence des ‘foukaha’, dictée par les conditions sociales dans un contexte historique où les femmes ne travaillaient pas à l’extérieur de la maison, tandis que les hommes étaient chargés de les entretenir. Aujourd’hui, les temps ont changé et les conditions sociales ont évolué, car non seulement la femme subvient à ses propres besoins, mais elle soutient aussi financièrement sa famille, y compris les hommes. Il n’est pas du tout juste que la femme et les filles contribuent à l’accumulation du patrimoine familial, aussi modeste soit-il, pour que les oncles ou leurs fils viennent ensuite prendre la moitié du patrimoine lorsqu’il y a une fille ou un tiers s’il y a plus d’une fille. Le même problème se pose lorsqu’il y a des enfants, garçons et filles, où les filles travaillent pendant que les garçons poursuivent leurs études ou sont au chômage, puis à la mort des parents, les garçons réclament la « part de deux filles ».
Si l’objectif de la charia est d’asseoir la justice, alors lorsque l’équité n’est pas atteinte, il devient pertinent et nécessaire d’en faire une relecture moderniste, afin d’atteindre son objectif premier.
Cela ne peut être réalisé qu’en tenant compte du contexte social et des valeurs contemporaines. par Said Lakhal.